Pourquoi le « Festival de l’ours » classé au patrimoine mondial de l’Unesco en Catalogne française vaut le détour

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Une légende, trois interprétations et un ours très assoiffé : voici comment vivre la culture traditionnelle catalane aux Fêtes de l’Ours dans les Pyrénées françaises, dernière inscription sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.

Avec une bouche souriante ressemblant à un requin et des yeux écarquillés collés à des angles étranges sur les côtés de sa tête, l’ours ressemble à un dessin d’enfant du monstre sous leur lit. Pourtant, le fait qu’il soit actuellement battu sur la tête à l’aide d’un sac à main matelassé rouge par un adolescent en drague dissipe toute trace de peur.

La ville de montagne d’Arles-sur-Tech est à moins de 40 km de la frontière espagnole. Les visiteurs d’Espagne ont l’impression qu’il a l’air typiquement français (volets bleus, toits de tuiles en terre cuite et balcons en fer forgé), tandis que ceux qui descendent du nord, moi y compris, commentent son aspect espagnol : mosaïques, tuiles colorées et grottes qui servent des pichets de Sangria. Mais c’est la Catalogne française, et Arles-sur-Tech est la première des trois villes à accueillir les Fêtes de l’Ours. Avec le passage symbolique d’une véritable patte d’ours, la tradition se déplacera désormais vers la commune de Prats-de-Mollo-la-Preste, où une autre fête aura lieu deux semaines plus tard.

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Festival de l'ours catalan femme habillée en boulanger traditionnel avec de la farine sur le visage
Les festivaliers peuvent s’attendre à des déguisements, à de la danse et à beaucoup de théâtre © Anna Richards

Le groupe joue une combinaison d’instruments de musique que je reconnais (tubas, trompettes et trombones) et d’instruments catalans que je n’ai jamais vus auparavant : flabiols (une sorte de flûte à bec avec un tambourin attaché), tables (un peu comme les clarinettes et un contrebaix (sorte de contrebasse à trois cordes). Pour la douzième fois au moins, ils ont entonné le refrain de « The Bear Song », adapté de « La Chanson de l’Ours » de Charles Trenet. (L’un des plus célèbres auteurs-compositeurs-interprètes français du XXe siècle, Trenet prenait régulièrement des vacances à Arles-sur-Tech.)

L’ours fait maintenant des ravages. Il fonce sur des enfants portant des seaux peints de manière criarde sur la tête, les faisant tomber à plat, puis grogne sur la foule et pousse des «tortues» – des enfants au visage peint en blanc et des bonnets de nuit de style Scrooge se cachant dans des tubes de toile pliables. Il s’échappe même de l’autre côté de la rivière, pour être ramené par le chasseur « canadien » qui, en vigatines (espadrilles) et un fedora noir à larges bords, on ne peut plus catalan.

Costumes du festival de l'ours catalan.jpg
Le ‘chasseur’ et ‘Rosette’ prennent part aux festivités © Benjamin Malassingne

Qu’est-ce que c’est?

Fête folklorique autour de la légende de Jean l’Ours. Il existe de nombreuses versions dans la mythologie française et espagnole, la plupart impliquant une créature mi-ours, mi-humaine. Dans l’histoire commémorée lors des Fêtes de l’Ours, l’ours enlève des femmes locales ; désespérés, les citadins recrutent l’aide d’un chasseur. L’amant du chasseur, une fille locale appelée Roseta, est séduit par l’ours – et Roseta et le chasseur utilisent alors une hache pour raser la bête afin de l’aider à retrouver son humanité. Au festival, cette métamorphose est symbolisée par la suppression de la tête de l’ours pour révéler l’acteur en dessous.

Le festival est le dernier ajout à la liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, inscrit en 2022, pour promouvoir la connaissance et la compréhension de la culture traditionnelle catalane.

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Quand est-ce que ça se passe ?

Annuellement chaque février. Arles-sur-Tech accueille le premier festival le premier week-end de février, et Prats-de-Mollo-la-Preste suit deux semaines plus tard (dimanche 19 février en 2023). Saint-Laurent-de-Cerdans clôture les festivités le dernier dimanche du mois, qui tombe cette année le 26 février.

Scènes de balcon du festival catalan de l'ours d'Arles-sur-Tech
Le ‘chasseur’ sauve ‘Roseta’ de l’ours © Anna Richards

Ce qui se produit?

Déguisements, danse et beaucoup de théâtre. Chaque ville a une manière différente de raconter l’histoire, et les habitants se rendent en masse pour les trois célébrations, qui durent un week-end complet. Les samedis sont réservés aux enfants, tandis que les dimanches sont réservés aux adultes. L’ours d’Arles-sur-Tech est un ours clownesque de style médiéval avec un sourire de requin à pleines dents. Prats-de-Mollo-la-Preste compte trois ours, chacun obligé de s’enduire d’un mélange d’huile et de suie et de confectionner ses propres tenues à l’aide d’une peau de mouton. (En 2022, pour la première fois, l’un des ours était une femelle.) L’ours de Saint-Laurent-de-Cerdans porte une vraie peau d’ours – recyclée chaque année jusqu’à ce qu’elle s’use.

A Arles-sur-Tech, les deux journées commencent par une procession à travers la ville, guidée par le chasseur et Roseta, pour rassembler les citadins ; l’ours apparaît pour la chasse à l’ours dans l’après-midi. Avec plusieurs arrêts pour faire le plein porros (récipient à boire catalan en forme de bang) avec du muscat, l’ours devient plus tapageur le jour des adultes. Les défilés sont entrecoupés d’interprétations de la sardanedanse catalane interdite sous Franco, et « L’estaca », chant de résistance antifranquiste.

Un homme buvant du vin muscat
Les festivités impliquent des danses, des discours en catalan, de la musique et du vin © Anna Richards

Où est-il et comment s’y rendre ?

Dans les Pyrénées françaises, entre Perpignan et la frontière espagnole. Perpignan dispose d’une liaison ferroviaire à grande vitesse avec Paris (cinq heures) et de vols directs vers plusieurs aéroports britanniques, dont Londres Stansted et Birmingham. Il existe des bus entre Perpignan et Arles-sur-Tech (1€ forfait). Pour Prats-de-Mollo-la-Preste et Saint-Laurent-de-Cerdans, changer à Arles-sur-Tech. Les visiteurs venant d’Amérique du Nord trouveront peut-être plus facile de prendre l’avion pour Barcelone et de louer une voiture pour le trajet de 118 miles (190 km).

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Ai-je besoin de billets ?

Non. Le festival est entièrement gratuit.

Puis-je trouver de la nourriture et des boissons au festival ?

Les boissons abondent pendant le festival. Du vin bon marché, de la bière et du Ricard sont en vente dans les deux bars de la ville (Central et Can Poch). La nourriture est plus limitée car les habitants ferment boutique pour profiter du festival ; attendez-vous à ce que quelques boulangeries restent ouvertes. Les billets pour le repas des chasseurs (repas des chasseurs, dimanche à partir de midi) en vente en s’adressant à l’avance à la mairie. Végétariens, méfiez-vous : les plats sont riches en viande. Même coca catalanegâteau plat et sucré, spécialité régionale, contient généralement soit du porc, soit du canard.

N’oubliez pas de faire vos valises…

Un appareil photo. De préférence avec un étui solide et étanche, surtout en cas de fête à Prats-de-Mollo-la-Preste, pour éviter d’enduire l’objectif d’une potion d’huile et de suie.

Où dois-je rester ?

Les trois villes sont petites et l’hébergement est limité : réservez tôt pour éviter toute déception. L’hôtel le plus proche d’Arles-sur-Tech est l’Appart’Hôtel Castel-Emeraude à Amélie-les-Bains, à une demi-heure à pied. Une bizarrerie tourelle décorée dans des couleurs vives, il est propre, dispose d’un petit-déjeuner buffet slap-up et d’installations indépendantes dans les chambres. L’hôtel le Bellevue à Prats-de-Mollo-la-Preste a, comme son nom l’indique, une vue fabuleuse, et l’hôtel-spa Le Domaine de Falgos à Saint-Laurent-de-Cerdans est résolument luxueux. Céret et Perpignan à proximité ont plusieurs hôtels si ces options sont complètes.

Le monastère de montagne de l'Abbaye-St-Martin-de-Canigou, Pyrénées, France
L’abbaye St-Martin-de-Canigou offre une vue spectaculaire sur les sommets des Pyrénées © Tanja Midgardson / Shutterstock

Mes coups de cœur pour un week-end parfait à Arles-sur-Tech

Déplacez-vous, la Nouvelle-Zélande : c’est sûrement le pays des romans de Tolkien, et la meilleure chose à faire est d’aller randonner dans les montagnes. Visible d’Arles-sur-Tech et s’élevant à une altitude de 9137ft (2785m) se trouve le mont Canigou, dont les légendes disent qu’il abrite un dragon gardant un lac souterrain (Smaug?…). Le sommet est à environ 30 km de la ville à vol d’oiseau, mais il faut 90 minutes en voiture pour atteindre le parking le plus haut de Casteil. De là, une courte promenade vous mènera à l’Abbaye Saint-Martin-du-Canigou, avec des vues spectaculaires sur les montagnes. Comptez une journée complète si vous montez au Canigou.

Dans la ville d’Arles-sur-Tech elle-même se trouve l’Abbaye Ste-Marie du VIIIe siècle, qui vaut bien une visite (ouverte du mardi au dimanche ; 4 €). Combinez cela avec une visite de l’ancienne usine de tissus catalans à la périphérie de la ville : Le Moulin des Arts et l’Artisanat a été transformé en une série de galeries et d’ateliers d’artistes présentant tout, des machines à tisser traditionnelles aux vitraux.

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